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+    <title>Le désert blanc</title>
+    <date>3 avril 2003</date>
+    <author>
+      <firstname>Fabien</firstname>
+      <surname>Niñoles</surname>
+      <email>fabien@tzone.org</email>
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+      <year>2003</year>
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+  
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+    <title>Le désert blanc</title>
+
+    <para>Dans le désert blanc de mes mots brille une lune noire
+      couverte d'étoiles filantes.  Sa longue chevelure coule comme un
+      ruisseau de miel et d'or dans les canyons profonds de la Voie
+      Lactée.  Je marche mot à mot sans penser à l'assèchement de
+      l'encre de mon stylo.  Quel mirage tente-je d'atteindre?  Quel
+      rêve particulier cours-je après?  Ne sais-je point.</para>
+
+    <para>La grammaire hésite un peu.  Du point ou de la virgule, elle
+      ne sait quel rythme choisir.  Malgré son pas un peu lourd, elle
+      a su garder la grâce et l'harmonie complexe qui fit sa
+      popularité.  N'a-t-elle point garder la magnifique clarté de ses
+      ancêtres?  Presque.  Elle le porte encore en elle bien que son
+      vocabulaire se soit essoufflé, battu par les vents de la
+      facilité et de la normalisation rigide.</para>
+
+    <para>Tiens, en voilà une ligne étrange.  La plume dégoulinante la
+      frôle légèrement, tâtonnante, cherchant sur elle un appui
+      presque imaginaire.  Que vient-elle faire ici?  Est-ce bien sa
+      place?  Au milieu de toutes les autres, on a peine à la
+      distinguer.  Pourtant, du moment qu'on s'approche d'elle, qu'on
+      prend la peine de l'observer, de la pincer, de l'écouter, on
+      s'aperçoit rapidement qu'elle est différente.</para>
+
+    <para>Ce doit être une ligne de portée qui n'a pas trouvé d'emploi
+      dans une partition quelconque.  Ou encore une ligne de danse,
+      oubliée au profit d'une ligne comptable, totalisant un budget
+      équilibré autour de rien, du vide, de zéro.  Peut-être aussi une
+      ligne à pêche?  Quel pêcheur qui, pour le plaisir ou le métier,
+      a pu oublier ainsi sa ligne dans les pages d'un cahier?  Ou
+      bien, c'est peut-être une de ces horribles lignes de
+      démarcation, qui marquent les frontières entre des peuples qui
+      ne sauront jamais qu'elles pourraient être franchies sans
+      danger.</para>
+
+    <para>Les lignes sont importantes aux humains.  Il y en a partout.
+      Elles sont la marque de frontières qui contiennent, de
+      séparations qui délimitent, de guides qui restreignent.  Elles
+      sont aussi des directions qui conduisent, des liens qui
+      harmonisent, des emmêlements qui, sous la forme d'une note,
+      d'une écriture ou d'un dessin, évoque, mystifie, émerveille,
+      effraie, enseigne, surprend, interroge, encourage, soutient,
+      comprend, consulte, bref, communique entre deux personnes qui
+      peut-être jamais ne se rencontreront.</para>
+
+    <para>La ligne, dans notre monde à quatre dimensions, avec notre
+      perception à trois dimensions, sur un médium à deux dimensions,
+      voici la ligne: petit être à l'unique dimension avec lequel tant
+      fut transmis!  Qu'en serait-il si nous avions pu la maîtriser
+      dans les dimensions supérieures tant de fois supérieures?
+      Qu'aurions-nous pu encore communiquer?  Faut-il que notre esprit
+      soit si limité pour n'être capable de communiquer que faits qui
+      peuvent se réduire à cette unique dimension?  À ce système somme
+      toute binaire d'informations?</para>
+
+    <para>C'est avec un point lasse que je reprends ma marche dans le
+      désert de cette page blanche.  N'y a-t-il point d'oasis dans
+      laquelle je pourrai à nouveau tremper ma plume?  Et pour qui?
+      Pourquoi cette marche forcée?  La conviction présente
+      sera-t-elle suffisante pour rejoindre les mirages qui se
+      dessinent devant moi?  Au fond de moi, mon âme entière me
+      réclame un acte de foi, mais envers qui?  Envers moi, envers ma
+      capacité à traverser ce désert sans embûche, ou plutôt malgré
+      ses embûches, ses pièges, ses tentations paresseuses d'abandon,
+      d'arrêt.</para>
+
+    <para>La dune invite à se laisser rouler, à descendre son flanc
+      jusqu'au creux froid de son corps arrondi.  Mon regard se tourne
+      vers la lune noire aux cheveux de miel.  Comme je m'étendrais
+      sur le sable du temps à t'admirer, mon impossible amour.  Tu
+      resteras là, aussi loin de moi que tu l'as toujours été.  Je
+      resterai là, aussi loin de moi que je l'ai toujours été.  Oui,
+      loin de moi, car depuis toujours, mon cœur, mon âme, mon cri
+      reste avec toi, et sans toi, je ne suis plus que la moitié de
+      moi-même.</para>
+
+    <para>C'est donc avec une certaine nostalgie que je plante à
+      nouveau ma plume sur cette page blanche et que je trace, trait
+      par trait, lettre à lettre, mot à mot, phrase à phrase,
+      paragraphe à paragraphe, jour après jour, semaine après semaine,
+      mon chemin vers toi, vers moi, vers notre rencontre finale et
+      depuis si longtemps espérée.</para>
+
+  </poem>
+  <nda>
+    <title>Le désert blanc (note de l'auteur)</title>
+    
+    <para>Cette prose a été écrite dans mon journal, un jour.  Une
+      forme d'écriture automatique, sans être vraiment de la transe ou
+      un complet relâchement de l'esprit.  Mais le texte est là,
+      remplit d'une étrange métaphore, symbole autant de ma relation
+      avec l'écriture, avec la société, mais aussi avec moi-même, avec
+      mes rêves.  Bref, métaphore de ma propre relation avec la vie au
+      milieu d'une période très sombre où j'en avais bien
+      besoin.</para>
+  </nda>
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