Le rasoir d'Ockham

[2006-01-03 00:47:58]

Le rasoir d'Ockham est un précepte qui nous enjoint, s'il y a deux hypothèses qui expliquent les données aussi bien l'une que l'autre, de préférer la plus simple.

Ce précepte est, à mon avis, l'un des plus mal utilisés lorsque cité dans une argumentation. À ce niveau, presque à chaque fois que j'aie vu le rasoir utilisé dans un schéma d'argumentation, il contrevenait à la règle numéro 7 de la bienséance argumentative.

Règle générale, toutefois, le rasoir est bien compris des gens, et bien utilisé. On doutera aisément de la franchise de quelqu'un qui nous arrive avec une explication carambolée pour expliquer son retard et ce, sans même expliciter le recours au rasoir. Ce précepte est donc bien construit intuitivement pour avoir rarement besoin d'être explicité, ce qui conduit à porter une certaine méfiance à celui qui se voit dans l'obligation de le préciser.

Il faut bien comprendre les subtilités du rasoir d'Ockham. La première est qu'il ne constitue nullement une preuve formelle! Le rasoir d'Ockham commence par supposer, dans ces prémisses, que les deux hypothèse expliquent aussi bien les données. Il ne dit rien sur la validité des hypothèses présentent. D'utiliser le rasoir d'Ockham comme preuve de la validité d'une hypothèse est donc un sophisme aussi grave, à mon avis, qu'une généralisation hâtive (on suppose vraie une hypothèse avant qu'elle soit prouvée) ou un faux dilemne (de faire croire qu'il n'existe que deux solutions possibles).

Ensuite, le rasoir d'Ockham nous demande que les deux hypothèses expliquent aussi bien les données. On a ici affaire à un jugement de valeurs, pas nécessairement entièrement subjectif. Les participants devront faire attention aux méthodes utilisées pour appuyer les hypothèses. Un argument basé sur une croyance douteuse et un autre basé sur une expérience contrôlée n'explique pas aussi bien les données l'un que l'autre. Le second devrait être favorisée sans même avoir à faire intervenir le rasoir d'Ockham, peu importe à quel point la première hypothèse est plus simple.

Finalement, le rasoir demande de favoriser l'hypothèse la plus simple. Encore une fois, c'est une question de jugement, surtout si les deux hypothèses sont également vraies. On pourrait utiliser les notions de complexité aléatoire ou organisée mais ces deux notions sont parfois contradictoires (en plus d'être discutables très souvent) l'une avec l'autre et pas nécessairement accessible au domaine. Généralement, le rasoir d'Ockham utilise la complexité organisée (soit le plus petit nombre d'arguments expliquant le phénomène), mais on peut voir aussi des cas assez clairs où c'est la complexité aléatoire qui a servi (l'évènement le plus probable est préféré). À moins que les hypothèses soient de natures similaires (auquel cas, le rasoir s'applique généralement naturellement), il est généralement très difficile d'exprimer une telle notion de façon objective.

Pour terminer, quelques exemples de sophismes courants reliés au rasoir d'Ockham: