[svn r1850] r2001@freebird: fabien | 2005-12-27 01:28:42 -0500 contes
authorfabien
Tue, 27 Dec 2005 13:55:27 -0500
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@@ -0,0 +1,77 @@
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+
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+
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+	genese.xml \
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+
+
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+# FOP=xmlto pdf
+FOP=fop
+CATALOG=$(TOP)/catalog
+
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+
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+
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+
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+
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+	cp -a $(OUTPUT)* $(INSTALL_DIR)
+
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+	rm -f *~ *.fo
+
+purge: clean
+	rm -rf $(OUTPUT)
+
+debug:
+	echo $(PRINT_STYLES)
+
+%.fo: %.xml $(PRINT_STYLES) $(SRC_DEPS)
+	SGML_CATALOG_FILES=$(CATALOG) xsltproc --catalogs --xinclude \
+		-o $@ $(STYLES_DIR)/story_print.xsl $<
+
+%.pdf: %.fo
+#	xsltproc -o $@.tmp.fo strip-attributes.xsl $<
+#	xmlto pdf -o $(dir $@) $<
+	fop $< $@
+#	rm $@.tmp.fo
+
+%.html: %.xml $(HTML_STYLES) $(SRC_DEPS)
+	SGML_CATALOG_FILES=$(CATALOG) xsltproc --catalogs --xinclude \
+		--stringparam css-base-dir '/~fabien/styles/' \
+		-o $@ $(STYLES_DIR)/story_html.xsl $<
+
+%/index.html: %.xml $(HTML_STYLES) $(SRC_DEPS)
+	rm -rf $(dir $@)
+	mkdir -p $(dir $@)
+	SGML_CATALOG_FILES=$(CATALOG) xsltproc --catalogs --xinclude \
+		--stringparam css-base-dir '/~fabien/styles/' \
+		-o $@ $(STYLES_DIR)/story_html.xsl $<
+
+%.txt: %.html
+	w3m -dump $< > $@
+
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+CATALOG "dtd/catalog"
+
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@@ -0,0 +1,65 @@
+<?xml version="1.0"?>
+<!DOCTYPE book PUBLIC "-//Fabien Ninoles//DTD Story XML V1.0//EN" 
+   "http://www.tzone.org/~fabien/dtd/story.dtd">
+<book lang="fr" xmlns:xi="http://www.w3.org/2003/XInclude">
+  <docinfo>
+    <title>Proses, contes et nouvelles</title>
+    <author>
+      <firstname>Fabien</firstname>
+      <surname>Niñoles</surname>
+      <email>fabien@tzone.org</email>
+    </author>
+    <copyright>
+      <year>1993-2002</year>
+    </copyright>
+  </docinfo>
+  <title>Proses, contes et nouvelles</title>
+
+  <section id="impressions">
+    <title>Petites histoires pour les plus grands</title>
+
+    <para>Voici un recueil de quelques-unes des nouvelles que j'ai
+      écrites.  Un ami cinéaste amateur, m'a déjà fait le commentaire
+      que mes nouvelles, bien qu'intéressantes, manquent passablement
+      d'actions à mettre au petit écran.  Ça doit être parce que
+      j'écris pour les yeux de mes lecteurs et la passion des mots
+      qu'ils, j'imagine, partagent avec moi.</para>
+
+    <xi:include href="jardin.xml"/>
+    <xi:include href="marche.xml"/>
+    <xi:include href="dorsey.xml"/>
+    <xi:include href="yeux.xml"/>
+  </section>
+  <section id="nargir">
+    <title>Nargir, ou le Monde d'Oliron</title>
+
+    <para>Nargir, c'est le nom que portait la Terre du Deuxième au
+      Quatrième Âge des Dragons.  C'est un monde fantastique, qui a
+      traversé sept grandes époques appelées les Sept Âges des
+      Dragons, du nom de ses Créateurs.  Couramment, que trois textes
+      ont été retrouvés et traduit sur l'histoire de Nargir même.  Je
+      vous les présente ci-dessous.</para>
+
+    <xi:include href="genese.xml"/>
+    <xi:include href="mythos.xml"/>
+  </section>
+
+</book>
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+<?xml version='1.0'?>
+<!DOCTYPE story PUBLIC "-//Fabien Ninoles//DTD Story XML V1.0//EN" 
+   "http://www.tzone.org/~fabien/dtd/story.dtd">
+<story id="dorsey" lang="fr">
+  <docinfo>
+    <title>La mort de Michael Dorsey</title>
+    <author>
+      <firstname>Fabien</firstname>
+      <surname>Niñoles</surname>
+      <email>fabien@tzone.org</email>
+    </author>
+    <copyright>
+      <year>1993</year>
+    </copyright>
+  </docinfo>
+  <title>La mort de Michael Dorsey</title>
+  <nda>
+    <para>Une de mes premières nouvelles absolument complète.  Je l'ai
+      écrite la première fois à ma deuxième année du secondaire.  Je
+      l'ai corrigé plus tard, suite à la mort d'un de mes oncles,
+      premier contact que j'avais avec cette petite soeur de la Vie.
+      <emphasis role="title">La mort de Michael Dorsey</emphasis> ne
+      se veut toutefois pas une nouvelle sur la mort elle-même.  C'est
+      plutôt une introduction, une invitation à l'introspection ou
+      quelque chose dans le genre.  L'année suivant la première
+      version, j'écrivais la suite dans le conte <emphasis>La Quête de
+      l'Identité</emphasis> (à paraître).</para>
+  </nda>
+
+  <para>La brise fraîche et humide me caressait doucement la peau. Je
+    ralentis ma course, tranquillement pour enfin m'arrêtai,
+    légèrement essoufflé en m'appuyant sur mon bâton de marche. Je
+    respirai l'air frais du matin sur les landes, me laissant envahir
+    par la douce senteur de l'herbe verte et des feuilles de chêne
+    puis je me remis en route d'un pas plus solennel. Bientôt,
+    j'entrai dans le cercle de vieux chênes qui couronnait la colline,
+    étouffés par le gui comme par une vieille barbe millénaire, et je
+    pus observer le titanesque dolmen et ses mégalithes d'un autre
+    âge.  Comment fut-il construit?  Comment ces lourds morceaux de
+    pierre arrachés à on ne sait quelle montagne lointaine y furent
+    emmenés?  Nulle légende ni logique historique n'a jamais pu
+    l'expliquer avec satisfaction.  En fait, une seule légende parle
+    de ce lieu, trace effacée d'un passé révolu que seule la tradition
+    orale en a gardé quelques échos.  Elle raconte que ce lieu avait
+    réuni les derniers druides une ultime fois avant leur massacre par
+    l'armée impériale de Rome. Les chênes qui y ont poussé seraient
+    donc les gardiens des derniers secrets druidiques et le dolmen, le
+    tombeau de leur savoir.  Peut-être est-ce à cause de cette
+    légendaire sagesse que les pèlerins venaient y trouver le repos?
+    Ce que je sais, toutefois, c'est que sa vue me réconforta.
+    J'avais beau considérer le Canada comme mon pays, avec ses grandes
+    montagnes, ses rivières tumultueuses, ses plaines immenses et son
+    grand silence blanc et froid, je venais souvent ici, sur la terre
+    de mes ancêtres chercher quelques choses en moi, une partie de mes
+    racines.  J'y venais tant pour soulager mon coeur de peines trop
+    lourdes, comme aujourd'hui, mais aussi pour me détendre et goûter
+    le bien-être que me procure l'air frisquet des collines habilement
+    mêlé par Mère Nature à l'air salin de la mer pour obtenir cet
+    harmonieux mélange de force et de liberté à leur état le plus
+    pur.</para>
+
+  <para>Après avoir parcouru l'incroyable couronne de vieux chênes,
+    enracinées dans la terre comme sur la tête d'un vieux roi trop
+    sage pour mourir, mon regard se posa sur le dolmen.  Un léger
+    sourire, bien qu'amer et triste, me vint aux lèvres en même temps
+    que la nostalgie de vagues souvenirs me ramenait au jour de ma
+    première rencontre avec cette région enchanteresse et ses
+    chaleureux habitants.  Je n'avais alors que six ans.  Je m'étais
+    égaré parmi les ombres de l'un des nombreux boisés touffus qui
+    entouraient la colline.  À force de longues et effroyables
+    errances, je m'était retrouvé en train de gravir la pente de cette
+    colline, exactement comme je venais tout juste de le faire.  La
+    vue des grands chênes répandant leurs ombres sur le sol ainsi que
+    celle du dolmen rougi par le crépuscule apaisa en moi mes craintes
+    et m'offrit le repos de sa protection comme il l'avait fait pour
+    tant d'autres avant moi.  Traversant le cercle d'arbres, je me
+    suis rendu sous le dolmen et m'endormis sous la grise assurance de
+    sa pierre froide.  Mes yeux se fermèrent doucement sur la
+    merveilleuse vision d'un ciel rouge s'éteignant tranquillement
+    pour laisser sa place aux étoiles du firmament.</para>
+
+  <para>Mon chemin me conduisit à travers les arbres majestueux
+    jusqu'au dolmen habillé de sa robe verdoyante.  Une fois rendu, je
+    fis un lent demi-tour contemplatif, admirant le paysage que
+    m'offrait chaque porche entre les arbres. Je vis Roderick qui s'en
+    venait d'un pas solitaire tout en regardant autour de lui les
+    merveilles que la nature lui offrait.  Son visage était triste et
+    nostalgique.  Sa vue me rappela durement le motif de ma venue,
+    motif que je fuyais me semblait-il, tout en le vivant pleinement.
+    J'en rougis d'une honte maladroite et je sentis un lourd poids
+    retomber sur mon coeur.  J'avais oublié la mort de monsieur
+    Dorsey, le père de Roderick.  Il était mort hier, dans la nuit,
+    d'un simple arrêt du coeur, son âme l'ayant quitté sans bruit.
+    C'était la simple mort d'un corps épuisé par la vie.  Roderick
+    l'avait veillé toute la nuit, ce qui expliquait ses yeux sombres,
+    eux qui étaient si clairs en temps normal.  Mais, même sans cela,
+    je doute qu'ils auraient pu être clairs en ce jour funeste.  On
+    venait de l'enterrer ce matin et nous étions venus ici faire un
+    pèlerinage comme le voulait la coutume.  Ce lieu était béni, béni
+    par tous.  Oui, béni par tous car, peu importe de quelle religion
+    on était issu, on y ressentait toujours un calme et un réconfort
+    que l'on pouvait qualifier de divin.  Monsieur Dorsey disait
+    souvent que ce lieu était <emphasis>béni des hommes</emphasis> car
+    peu importait le reste en ce lieu.  Et maintenant, c'était moi
+    qu'il réconfortait de la tristesse qui m'envahissait.</para>
+
+  <para>C'était Roderick qui m'avait trouvé, endormi, sous le dolmen.  Il
+    avait douze ans alors.  On ne se comprenait pas (lui parlait
+    l'anglais et moi le français) mais il a dû déduire que j'étais
+    perdu et m'emmena chez son père.  Je me rappelle encore des folles
+    galopades où j'essayais bien en vain de me tenir en selle sur le
+    dos de son chien ainsi que de nos éclaboussures à la fontaine
+    alors qu'on était sur le chemin de la maison.  Une fois arrivé, je
+    pus admirer la simple beauté du site.  Une petite maison à un seul
+    plancher avec à ses cotés, un joli petit jardin florissant.  Un
+    peu plus loin se trouvait une bergerie et un grand enclos où
+    paîtraient paisiblement un petit troupeau de moutons.  Tout cela
+    était tenu dans un ordre impeccable.  Puis nous sommes entrés chez
+    lui où je rencontrai son père, Michael Dorsey.  Ce grand homme aux
+    yeux foncés et à la peau rude portait encore le deuil de sa femme
+    même si cela faisait plus de six ans qu'elle était morte.  Pour
+    lui, elle méritait beaucoup plus et elle devait avoir sa fidélité
+    jusqu'à sa mort.</para>
+
+  <para>Mis à part lorsqu'on parlait de sa femme, monsieur Dorsey
+    était un homme sympathique et souriant aux multiples talents.
+    C'était un merveilleux ébéniste et c'est lui qui avait sculpté le
+    magnifique bâton de que je serrais fort entre mes mains.  Il
+    connaissait aussi bien des légendes et se plaisait à les raconter
+    à qui voulait bien les entendre.  C'est donc ce qu'il fit après
+    avoir envoyé son fils au village chercher mes parents.  Monsieur
+    Dorsey savait parler ma langue quoiqu'avec un fort accent et, je
+    m'en aperçu que beaucoup plus tard, un certains manque
+    d'idiotismes.  Il l'avait appris de sa femme, Normande qui avait
+    traversé la Manche avec sa famille et y était restée pour vivre
+    avec ce bel homme.  Pourtant, cette lacune ne faisait qu'embellir
+    ces récits d'une couleur bien saxonne due à la traduction mot à
+    mot des expressions.  J'adorais l'écouter.  Toute l'émotion qu'il
+    savait y mettre, tous les détails qu'il décrivait rendait au récit
+    une apparence de réalité fantastique.  On se serait souvent crû en
+    train d'écouter le récit d'un aventurier perdu, ou peut-être celui
+    d'un mage ayant soulevé le voile d'un lointain passé oublié
+    depuis.  Ce savoir qu'il avait reçu de son père et qu'ils se
+    transmettaient de génération en génération était un héritage de
+    grande valeur comme peu il en reste sur notre Terre.  C'est pour
+    cela que Roderick mettait par écrit tout ce qu'il avait appris de
+    son père car il lui était impossible d'avoir des héritiers.
+    Parfois, je dactylographiais les brouillons qu'il m'envoyait,
+    laissant résonner les images de ces légendes fabuleuses.  Ma
+    famille vint me chercher dans l'après-midi et monsieur Dorsey en
+    profita pour leur démontrer un autre de ses talents.  Le goût de
+    l'agneau qu'il servit à ma famille pour souper me manquera
+    beaucoup.</para>
+
+  <para>L'évocation de ces délicieux souvenirs me firent venir ;es
+    larmes aux yeux.  Je remarquai les même larmes mais pleines d'une
+    horrible douleur dans les yeux de Roderick.  Il avait traversé le
+    cercle d'arbres et s'était accroupi près du dolmen en marmonnant
+    une prière.  Roderick, tout comme moi, était chrétien.  Pourtant,
+    il préférait prier près du dolmen que face à un crucifix.  Il
+    disait, reprenant en cela les enseignements de son père, que Dieu
+    ne lui en voudrait pas car ses prières sincères et que le dolmen
+    représentait le tombeau du Christ pour lui.  Je me recueilli
+    auprès de lui et priai moi aussi pour le cher défunt.  Même le
+    ciel semblait s'être mis en deuil tellement il était gris et
+    terne.  C'était comme si le soleil avait perdu l'un de ses rayons
+    et s'était caché pour mieux pleurer.</para>
+
+  <para>On commença à s'installer pour la nuit.  Nous l'avions décidé
+    d'un commun accord, même le mauvais temps n'allait pas nous
+    empêcher de veiller celui que l'on a tant chéri et qui nous a tant
+    aimés. On s'enveloppa dans de chaudes couvertures.  J'admirais la
+    volonté dont faisait preuve Roderick à veiller son père sans repos
+    depuis deux jours alors que moi, je commençais déjà à sentir
+    l'emprise du sommeil sur mon esprit.  Je n'avais guère de choses à
+    dire et Roderick semblait être de l'avis à garder le silence toute
+    la veillée.  Je ravalai donc les mots que j'allais dire et
+    soulevai mon bâton à la hauteur de mes yeux.  Les différents
+    reliefs représentaient pratiquement toute la mythologie des vieux
+    pays: sirènes, sylphides, elfes et nains y peuplaient les forêts,
+    les mers et les montagnes.  Des dragons et des chevaux ailés s'y
+    battaient aux cotés des anciens symboles druidiques et normands du
+    Chêne, des Éclairs et de la Lune.  Une splendide licorne, de façon
+    plus récente, y trônait au sommet d'une montagne.  Une tige de
+    bronze passait sur toute la longueur du bâton.  On ne la voyait
+    qu'aux extrémités où elles formaient des bas reliefs: Celui du bas
+    semblait représenter des flammes et celui du haut, le soleil au
+    midi d'un été.  Je ne remarquai aucune présence de l'être humain
+    parmi ces motifs.  Quoiqu'il en fût, ce bâton avait une grande
+    valeur culturelle et qu'il me soit donné me fut un grand honneur.
+    Sa famille se l'était transmise depuis plusieurs siècles et chacun
+    en faisait une petite partie.  Ce fut Michael qui finit l'ouvrage
+    par la licorne.  Il l'avait sablé puis avait demandé à Roderick de
+    le vernir à l'aide de résine.  Comment le bois avait-il pu tenir
+    si longtemps, même Roderick l'ignorait.  Et pourquoi me fut-il
+    donné à moi?  Je l'ignore mais Roderick pense qu'il devait y avoir
+    une raison précise et qu'il n'y avait que moi pour le recevoir une
+    fois terminé.  J'allais à nouveau questionner Roderick à ce sujet
+    mais la fatigue se posa sur mes paupières et je m'endormis
+    tranquillement, alors que le jour laissait sa place à la nuit et
+    qu'une faible pluie s'était mise à tomber, nous brouillant la vue
+    du monde qui nous entourait.</para>
+</story>
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+1er élément: Chair
+Position-3d: Centre
+Position-2d: Centre
+Affiliation: Neutre
+Valeur: Amour
+Défaut: Faible
+Être mythique: Androgyne
+Planète: Terre
+
+Élément majeur 1: Lumière
+Position-3d: Base - Axe Vertical
+Position-2d: Ouest
+Affiliation: Ordre
+Valeur: Justice
+Défaut: Tyrannie
+Être mythique: Licorne
+Planète: Soleil
+
+Élément majeur 2: Éther (ou Rêve)
+Position-3d: Haut - Axe Horizontal
+Position-2d: Est
+Affiliation: Chaos
+Valeur: Liberté
+Défaut: Insouciance
+Être mythique: Chimère
+Planète: Lune
+
+Élément mineur 1a: Terre
+Position-3d: Nord
+Position-2d: Nord-Est
+Affiliation: Ordre
+Valeur: Pouvoir
+Défaut: Oppresseur
+Être mythique: Dragon
+Planète: Jupiter
+
+Élément mineur 1b: Métal
+Position-3d: Sud
+Position-2d: Sud-Est
+Affiliation: Ordre
+Valeur: Volonté
+Défaut: Sourd
+Être mythique: Golem
+Planète: Saturne
+
+Élément mineur 2a: Feu
+Position-3d: Est
+Position-2d: Sud-Ouest
+Affiliation: Chaos
+Valeur: Courage
+Défaut: Témérité
+Être mythique: Phénix
+Planète: Mars
+
+Élément mineur 2b: Eau
+Position-3d: Ouest
+Position-2d: Nord-Ouest
+Affiliation: Chaos
+Valeur: Désir
+Défaut: Aveugle
+Être mythique: Hydre
+Planète: Vénus
+
+Voilà... certains éléments varient d'une culture à l'autre (modification
+de l'être mythique, des noms des éléments, de certaines valeurs) mais en
+général, c'est la définition la plus acceptée.
--- /dev/null	Thu Jan 01 00:00:00 1970 +0000
+++ b/genese.xml	Tue Dec 27 13:55:27 2005 -0500
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+<?xml version='1.0'?>
+<!DOCTYPE story PUBLIC "-//Fabien Ninoles//DTD Story XML V1.0//EN" 
+   "http://www.tzone.org/~fabien/dtd/story.dtd">
+<story id="genese" lang="fr">
+  <docinfo>
+    <title>Le Livre du Monde par Oliron</title>
+    <author>
+      <firstname>Fabien</firstname>
+      <surname>Niñoles</surname>
+      <email>fabien@tzone.org</email>
+    </author>
+    <copyright>
+      <year>1998</year>
+    </copyright>
+  </docinfo>
+  <title>Le Livre du Monde par Oliron</title>
+  <nda>
+    <para>Aussi connu sous le nom de la Genèse, ce texte est l'un des
+      éléments majeurs pour notre connaissance de la création de
+      Nargir.  Plusieurs sections sont encore manquantes ou sont
+      restées intraduisibles.  Nous espérons pouvoir compléter un jour
+      cet excellent ouvrage de référence.</para>
+  </nda>
+  <section>
+    <title>La Genèse</title> 
+
+    <para>Alors que les Sept Dragons étaient jeunes, ils se réunirent
+      un jour et, à la demande de leur Mère, se mordirent chacun la
+      queue en étendant leurs ailes.  Au milieu de la sphère qu'ils
+      formaient naquirent deux Sources.  L'une était faite de lumière
+      et de feu, l'autre était d'argile, mélange de terre et d'eau.
+      La première attira la faveur des Dragons.  Ils l'appelèrent
+      <emphasis>Rêve</emphasis> car elle chantait et dansait mais
+      n'avait nulle substance.  La deuxième Source fut appelée
+      <emphasis>Essence</emphasis>. Elle fut nommée ainsi car elle
+      pouvait être tout mais n'avait ni forme ni mémoire.</para>
+
+    <para>Les Dragons battirent des ailes et soufflèrent sur la Flamme
+      du Rêve afin qu'elle se mélange à la source d'Argile.  L'Argile
+      prit forme et l'eau se sépara de la terre.  Le souffle des
+      Dragons modela la terre et où leur haleine passa apparurent
+      faunes et flores, mers et montagnes.  Quelques morceaux de Rêve
+      se dispersèrent à la surface de la Terre.  Les Enfants Premiers
+      du Rêve se joignirent aux Enfants Premiers de l'Essence.  La
+      Mère des Dragons vit que c'était bien et félicita ses
+      Enfants.</para>
+
+    <para>La Mère des Dragons préleva deux morceaux à même la chair de
+      ses seins et les mélangea à un morceau d'Essence et à un morceau
+      de Rêve.  Du Rêve naquit alors un enfant de Lumière, immortel et
+      éphémère, éblouissant et fragile.  L'enfant prit pour nom Fæl.
+      De l'Essence naquit un enfant chauve et aveugle.  Il avait la
+      couleur de l'Argile et l'Argile lui bouchait les yeux.  L'enfant
+      resta couché au creux de la main de sa Mère, terrifié par ce
+      qu'il ne pouvait voir.  Elle s'approcha alors de Fæl et
+      l'endormit.  Pendant qu'il dormait, elle lui prit son coeur et
+      le mit contre celui de son frère.  Lorsque Fæl se réveilla, il
+      vit que sa Mère avait repris son coeur pour le remettre à son
+      frère.  Fæl dit alors à sa Mère :</para>
+    
+    <dialog>
+      <cite>Pourquoi as-tu donné à mon frère ce qui me venait de
+        toi?</cite>
+
+      <cite>C'est dans le Rêve que l'idée vit et c'est dans l'Argile
+        qu'elle se réalise.  Ton frère est incapable de te voir, toi
+        ou les Sept Dragons.  Il ne voit que l'Argile où il est né.
+        En partageant ton coeur, il pourra apercevoir la vraie nature
+        des choses.  Tu veilleras sur ton frère car ton coeur bat au
+        coté du sien.  En échange, tu auras l'éternité puisque tu
+        possèdes déjà la mémoire.  Ton frère sera ton attache avec le
+        monde et c'est par lui que tu réaliseras ton destin.</cite>
+    </dialog>
+
+    <para>Fæl regarda son frère qui dormait et lui donna le nom d'Iol,
+      qui veut dire l'Endormi.</para>
+
+    <para>Des enfants de Fæl, il y eut Loïc, Grand-père des
+      Loups-garous, Arthigel, Premier Roi des Elfes, Torin, Grand Chef
+      des Gnomes, Thalia, Reine du Peuple Fée, Silvia, la Dryade,
+      Maîtresse des Bois, Lilian, la Licorne, Reine des Clairières,
+      Philistine des Profondeurs, Régente des Sept Mers et Thöl, le
+      Phénix.  De ces derniers, plusieurs ont rejoint le Cercle des
+      Dragons, mais leur immortalité les consacre à jamais comme les
+      Pères des Gens du Rêve.</para>
+
+    <para>Des enfants d'Iol, on ne retiendra que Caïn, qui fut
+      corrompu par la Bête, Mojardhi Alham Morhid, l'Éveillé, le
+      Premier Immortel, Nancie Garann, Celle-qui-écoutait, Thor, le
+      Forgeron, Merlin, l'Enchanteur, Omer, le Rêveur et Roman, le
+      Champion.  Les enfants d'Iol ne vivent que peu de temps, et peu
+      d'entre eux gardent la mémoire de leur vie.</para>
+  </section>
+  <section>
+    <title>De la venue de la Bête</title>
+
+    <para>L'un des Sept Dragons avait un fils qui lui-même avait
+      plusieurs enfants.  L'un de ces enfants avait en lui beaucoup
+      d'orgueil et s'appelait För car il pensait pouvoir devenir aussi
+      puissant que ses parents.  Il se mit donc en l'esprit le désir
+      de créer un double de lui-même et de lui donner vie.  Grand mal
+      lui en prit car les Enfants des Enfants de la Grande Mère ne
+      peuvent donner vie.  Il descendit sur Terre alors qu'elle était
+      jeune et que l'Argile primaire ne s'était pas encore séparé.  Il
+      revint alors et comme il était sale, il demanda à la Grande Mère
+      de le laver.  Il rusa et en profita pour lui prendre un peu de
+      sa salive.  Il disparut alors aux confins de la Nuit et commença
+      son oeuvre.</para>
+
+    <para>La Bête qui naquit de l'Argile et de la Salive Première
+      était aussi apeurée que l'avait été Iol à sa Naissance.
+      S'apercevant de cela, För cacha la Bête et s'enquit chercher une
+      partie du Feu du Rêve.  La Bête resta là, seule et apeurée, et
+      grandit dans la noirceur développant des pensées terribles dans
+      la froideur du vide.</para>
+
+    <para>La Bête s'était endormie lorsque För revint avec le Feu du
+      Rêve.  Lorsqu'il s'approcha d'elle, cette dernière se réveilla
+      et fut effrayée par cette lumière qu'elle voyait pour la
+      première fois.  La Bête fut prise de panique et attaqua För et
+      le mordit au talon.  Le Feu que För tenait à sa main tomba sur
+      la tête de la Bête et lui brûla les yeux.  Elle poussa un cri de
+      douleur et s'enfuit.  För, blessé et honteux, se cacha et
+      disparut dans le vide où la Bête était née.</para>
+
+    <para>La Bête erra longtemps dans sa folie.  Le malheur voulut
+      qu'elle finit par franchir le Cercle des Dragons avant que ce
+      dernier se referme.  La Source du Rêve l'éblouit et elle recula
+      devant elle pour tomber sur la Terre dans un désert où les
+      enfants d'Iol avaient grandi.  La faim la prit alors car elle
+      n'avait pas mangé depuis longtemps et que c'était la première
+      fois qu'elle se retrouvait en contact avec l'Argile dont elle
+      était née.  Elle mangea nombre d'hommes, de bêtes, de forêts et
+      de pierres.  Les Sept Dragons voyant leur création ravagée,
+      prirent ce qu'il restait du Feu du Rêve et créèrent le Soleil.
+      Ils prirent ce qui restait de l'Argile et créèrent la Lune.  La
+      Bête ainsi cernée abandonna sa proie et alla se terrer au centre
+      de la Terre, retrouvant sa place parmi les Enfants de
+      l'Essence.</para>
+  </section>
+  <section>
+    <title>De la Fermeture du Cercle et de l'Enchaînement du
+      Gardien</title>
+
+    <para>Les Sept Dragons étaient troublés par la Destruction causée
+      par la Bête.  Ils se mirent d'accord sur la nécessité de
+      refermer à tout jamais le Cercle qu'ils formaient autour du
+      monde.  On amena alors devant la Grande Mère des Dragons För qui
+      s'était rendu coupable du trouble causé à la Création des
+      Dragons.  La Grande Mère parla ainsi :</para>
+
+    <dialog>
+      <cite>För, tu as voulu être aussi fort que moi mais tu n'as pas
+        su t'occuper de ta création et tu as mis la mienne en péril.
+        Pour cela, je te punirai justement en te forçant à garder la
+        mienne à tout jamais.  Tu seras défait de tes pouvoirs et on
+        t'enchaînera au Monde afin que tu retiennes à même ton âme et
+        ton corps le Cercle des Dragons.</cite>
+    </dialog>
+
+    <para>Les Dragons firent comme leur Mère l'avait ordonné et
+      retirèrent à För ses ailes, sa langue, ses yeux et son nom.
+      Réduit ainsi à l'impuissance, ils le portèrent sur Terre où ils
+      le lièrent à leur voeux par sept lourdes chaînes : deux aux
+      chevilles, deux à la taille, deux aux poignets et une au cou.
+      Ils s'envolèrent alors portant chacun une chaîne à leur cou et
+      reprirent leur position dans le ciel.  Ils prirent chacun la
+      queue d'un de leurs frères dans leur gueule et chantèrent une
+      dernière fois leurs adieux.  Ils enroulèrent alors les chaînes
+      qu'ils portaient autour de leurs museaux et de leurs ailes afin
+      que jamais plus on ne vienne nuire à leur création.</para>
+
+    <para>Ce fut la dernière fois que les Enfants de Fæl entendirent
+      le Chant des Dragons.</para>
+  </section>
+</story>
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+<story id="jardin" lang="fr">
+  <docinfo>
+    <title>Le jardin du peintre</title>
+    <author>
+      <firstname>Fabien</firstname>
+      <surname>Niñoles</surname>
+      <email>fabien@tzone.org</email>
+    </author>
+    <copyright>
+      <year>1995</year>
+    </copyright>
+  </docinfo>
+  <title>Le jardin du peintre</title>
+  <nda>
+    <para>J'ai écrit ce court texte par un bel après-midi d'été dans un
+      parc sur la rue Mont-Royal.  C'était lors d'une fête de quartier
+      et une école de peinture était venue s'y installer histoire d'en
+      apprécier la <emphasis>lumière</emphasis>.</para>
+
+    <para>Tous ceux qui ont lu cette histoire avaient une idée
+      différente du personnage narrateur après le premier paragraphe.
+      Et vous, <ulink url="mailto:fabien@tzone.org">quelle
+      est-elle?</ulink></para>
+  </nda>
+
+  <para>Un brin d'herbe verte me chatouillait le nez.  Hérissés sur la
+    terre dure, ses semblables se laissaient balancer par le vent
+    avant d'être écrasés par les pas d'un passant.</para>
+
+  <para>Ce dernier déploya son chevalet sur ses trois pieds et ouvrit
+    une petite mallette.  Il vérifia si tout y était de l'air grave
+    d'un homme de science penché sur ses instruments.</para>
+
+  <para>Il revint, transportant une toile précieusement emballée de
+    tissu blanc.  Il déposa son paquet à même le sol et le déballa
+    avec précaution pour le poser sur son chevalet.  Puis,
+    contrairement à ce qu'on pourrait s'attendre, l'homme s'assit dos
+    à celui-ci et, fixant le paysage qu'il allait peindre,
+    attendit.</para>
+
+  <para>Ça faisait déjà plusieurs années qu'il venait à ce même
+    endroit travailler sur cette même toile.  Il s'asseyait toujours
+    ainsi, ses bras enlaçant ses jambes repliées contre son torse, les
+    pieds croisés.  Je pouvais facilement m'imaginer ce qu'il
+    cherchait: la lumière... la vraie lumière.  Celle qu'il avait vue
+    la première fois qu'il était passé par ce parc.  Depuis, il avait
+    troqué ses verres fumés, qui l'empêchaient de voir les couleurs du
+    ciel, pour un vieux chapeau de toile protégeant son crâne à la
+    calvitie maintenant bien avancée.</para>
+
+  <para>Le soleil baissait et dans son visage, je pouvais presque lire
+    les souvenirs qu'il invoquait pour lui-même.  Sa lumière, il
+    l'avait tant cherchée les premières fois, tentant vainement de
+    retrouver les couleurs exactes de son souvenir.  Puis, il avait
+    fini par comprendre le temps qui semblait dévorer son trésor
+    précieux.  Il avait compris qu'il cherchait quelque chose qui ne
+    reviendrait plus, tout comme sa jeunesse et ses cheveux perdus, et
+    que jamais il ne reverrait cette merveilleuse journée.</para>
+
+  <para>On aurait pu croire cet homme triste et son regard bleuie de
+    nostalgie lorsqu'il regardait ainsi la réalité superposée à ses
+    rêves.  Il l'avait d'ailleurs sûrement été au début lorsque ses
+    souvenirs commençaient à s'estomper comme une toile vieillissant
+    sous le soleil du temps.  Des larmes de colère et de peine avaient
+    dû couler de ses yeux sur son coeur.  Il aurait alors voulu tout
+    brûler et ne jamais revenir.  Mais le jardin des souvenirs se
+    remplit de mauvaises herbes lorsqu'il est maltraité.  Au jardinier
+    qui n'en prend pas soin, qui ne retourne pas sa terre au
+    printemps, qui ne fait pas ses semis ou n'installe pas de tuteurs
+    aux plants qui en ont besoin, le jardin meurt.  À celui qui ne
+    nourrit pas son jardin, qui ne l'arrose pas les jours où le temps
+    lui refuse sa pluie, la plus prometteuse des terres s'assèche et
+    devient désert où plus rien ne pousse.</para>
+
+  <para>Par chance, l'homme avait finit par comprendre la soif de son
+    jardin.  C'est pourquoi il venait ici à tous les jours, attendant
+    patiemment et se laissant imprégner de la couleur du jour
+    finissant.  Il y oubliait ses troubles et sa rancoeur pour enfin
+    se lever et rajouter une nouvelle teinte, un nouveau ciel à sa
+    toile.</para>
+
+  <para>Il peignit alors que le jour descendait.  S'il peignait un
+    rayon de soleil, c'est que sa journée s'était bien passée.  S'il
+    peignait un peu de pluie, c'est qu'il nourrissait son jardin: la
+    terre qu'il avait bien traitée allait absorber son chagrin et
+    faire pousser pensées et sagesses.  L'homme ne craignait plus ni
+    la pluie ni le beau temps.  Il les avait apprivoisés.</para>
+
+  <para>Le soleil avait pris une teinte sombre.  Bientôt, la nuit
+    endormirait nos sens.  Déjà, l'homme nettoyait ses pinceaux.
+    M'appuyant sur un coude, je lui souris.  Il se tourna vers moi,
+    rayonnant et heureux.  Avant même de voir la toile, je savais que
+    la pluie qui était tombé ce matin avait laisser sa place à ce beau
+    coucher de soleil.  Je me levai et partis l'aider à serrer sa
+    toile.  J'aimais cet homme, il était mon mari.  Nous nous étions
+    croisés dans ce parc il y a longtemps déjà et, chaque jour depuis,
+    nous nous y sommes retrouvés pour s'apprivoiser.  Aujourd'hui,
+    prenant soin d'un jardin mûrissant, nous étions deux sur sa toile
+    où la peinture fraîche se mêlait aux vieilles couleurs.</para>
+
+</story>
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+  <docinfo>
+    <title>La vie en marche</title>
+    <author>
+      <firstname>Fabien</firstname>
+      <surname>Niñoles</surname>
+      <email>fabien@tzone.org</email>
+    </author>
+    <copyright>
+      <year>1994</year>
+    </copyright>
+  </docinfo>
+  <title>La vie en marche</title>
+
+  <nda>
+    <para>Bon, avant que vous me le demandiez, la nouvelle se passe
+      sur la rue St-Hubert, en descendant du cégep Ahuntsic jusqu'au
+      pont qui relie le boulevard des Laurentides à Laval et la rue
+      Lajeunesse à Montréal.</para>
+
+    <para>J'ai écrit cette nouvelle pour la première parution du
+      journal du département des Lettres du cégep Ahuntsic en avril ou
+      mai 1994.  Tout comme vous, probablement, j'ignorais jusqu'au
+      dernier moment ce qui allait arriver au héros.</para>
+  </nda>
+
+  <para>Mercredi midi, après les cours, le soleil rayonne à son plus
+    fort dans ces douces journées de mai.  Quelques nuages, voyageurs
+    éparses de nos cieux, parcourent de leurs yeux de brumes les
+    allées et venues de la cité.  Sac sur le dos, l'esprit libéré des
+    tensions de la vie, je regarde les gens.  Mon pas flânant se
+    répercute dans sa course éperdue en contrepoint avec la symphonie
+    urbaine.  "Les gens ont du temps à perdre", me dis-je.  Oh oui!
+    qu'ils doivent en avoir du temps à perdre comme j'en ai longtemps
+    perdu.  Des temps de soleil ou de pluie, des temps pour respirer
+    et vivre.  J'ai couru moi aussi, pensant que c'était du temps
+    gagné.  Ah! Que de différences avec l'allure adoptée qui laisse
+    enfin le temps aux rayons de l'astre divin pour nous rattraper de
+    sa jeune chaleur d'été.</para>
+
+  <para>Tranquillement, les lignes du trottoir défilent telles les
+    traverses d'un chemin de fer me guidant loin de chez moi, vers
+    l'Aventure de l'Ouest et les Grandes Ruées.  J'oublie le temps,
+    j'oublie l'histoire et l'avenir, je ne garde que le moment.  Mes
+    yeux quittent les brumes trop rapides des rues pour se maintenir
+    sur le défilement verdoyant de mes frères plus âgées qui ont
+    compris depuis longtemps que la vitesse ne fait que comprimer le
+    temps, et que cela n'a rien à voir avec toutes les grandes
+    théories de notre époque.</para>
+
+  <para>Un feu, la circulation automobile s'arrête pour aller plus
+    vite.  La sonnerie stridente d'un cellulaire, chef d'oeuvre de
+    notre civilisation de surhommes à mallette pour qui la vie est une
+    affaire à négocier au plus vite, me rappelle comment l'évolution
+    du travail à libérer l'homme de son bureau pour mieux s'infiltrer
+    chez lui, dans son intimité et ses loisirs.  Encore une fois,
+    c'est pour gagner du temps, du temps pour de l'argent mais pas
+    pour les gens.  C'est de l'économie de bouts de chandelles que
+    l'on brûle par les deux bouts.  Alors que le feu passe au vert, je
+    continue ma marche salutaire, détournant mes pensées de ce méandre
+    de klaxons impatients.</para>
+
+  <para>J'ai troqué le trottoir pour le sentier asphalté, mes yeux ne
+    se détournent plus de la rivière.  Je la suis à l'encontre de son
+    courant, eaux libres et claires, chantant leur joie, le bris
+    encore récent il me semble - ai-je vraiment perdu tout ce temps?
+    - de leur prison hivernale.  Et elles transportent sur leur dos
+    large, brodé de dentelles blanches au dessin de chevauchées
+    fantasques, les débris de la société qui la borde, société à
+    laquelle elle a donné vie, force et moyens, et qui menace
+    maintenant de la détruire par ses abus.  C'est vers cette mère
+    bienfaitrice que je me dirige, pour demander un nouveau service à
+    celle qui se meurt déjà, pour me débarrasser du trop lourd poids
+    qui pèse sur mes épaules.</para>
+
+  <para>Le pont est là, devant moi, et je commence à monter sa légère
+    pente.  Je ne peux empêcher mes pas d'accélérer comme auparavant
+    lorsque j'étais pressé par les horaires.  Mais cette fois, c'est
+    la légèreté qui les porte et non le stress de mon ancienne vie.
+    Je soupèse mon sac et un sourire bête d'original s'inscrit sur mon
+    visage alors que, à mesure que je m'élève au-dessus de mon reflet,
+    j'imagine cruellement la chute vers l'amnésie froide de ses
+    bras.</para>
+
+  <para>M'y voilà au-dessus de cette envolée libre d'écume brunâtre.
+    Écume libératrice, cercueil de ce qui sera ma dernière chaîne dans
+    ma vie de cégépien.  Deux années de bouquins emmagasinées dans un
+    simple sac, assez de poids pour l'entraîner dans les limbes
+    aqueuses de la rivière.</para>
+
+  <para>Voici la chute.  C'est comme un doux vol d'oiseaux blancs, des
+    outardes qui annonceraient la fin d'un printemps boueux, le début
+    d'un nouvel été libérateur.  Et je suis l'un de ces oiseaux,
+    libéré de mes études, de mes travaux, de cette vie minable de gens
+    pressés qui manquent de temps, qui perdent leur temps.  Et mon
+    regard plonge vers ces eaux agitées, libre, enfin libre.</para>
+
+  <para>Mes épaules sont légères et mon esprit rêveur délivré.  Je
+    n'entends rien, même plus la circulation automobile sur le pont, à
+    mes cotés.  Quelques feuilles virevoltent encore, témoins du
+    dernier sacrifice que la Dame bleue a fait pour m'aider.  Mon sac
+    vide sur l'épaule, je redescends, ne quittant pas des yeux le
+    nouvel horizon qui s'ouvre devant moi.  J'ai fini le cégep, vive
+    les vacances!</para>
+</story>
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+-6
+6 3998 4519 6143 5914
+4 1 0 50 0 2 18 1.5708 4 195 915 4193 5217 Licorne\001
+4 1 0 50 0 2 18 1.5708 4 225 825 4823 5217 Justice\001
+4 1 0 50 0 2 18 1.5708 4 195 1020 5453 5217 Lumi\350re\001
+4 1 0 50 0 2 18 1.5708 4 255 1395 6083 5217 Tyrannique\001
+-6
+6 5799 6575 7735 8895
+4 1 0 50 0 2 18 2.6180 4 195 825 6254 8520 Ph\351nix\001
+4 1 0 50 0 2 18 2.6180 4 255 1005 6570 7974 Courage\001
+4 1 0 50 0 2 18 2.6180 4 195 450 6886 7428 Feu\001
+4 1 0 50 0 2 18 2.6180 4 195 1230 7202 6882 T\351m\351raire\001
+-6
+6 8902 6715 10611 8908
+4 1 0 50 0 2 18 3.6652 4 195 810 10163 8536 Golem\001
+4 1 0 50 0 2 18 3.6652 4 195 960 9849 7990 Volont\351\001
+4 1 0 50 0 2 18 3.6652 4 195 705 9535 7444 M\351tal\001
+4 1 0 50 0 2 18 3.6652 4 195 735 9221 6898 Sourd\001
+-6
+6 8481 1217 10544 3646
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+4 1 0 50 0 2 18 5.7596 4 195 660 9425 2703 Terre\001
+4 1 0 50 0 2 18 5.7596 4 255 1380 9109 3249 Oppresseur\001
+-6
+6 3315 778 13176 9384
+4 1 0 50 0 2 24 4.7124 4 255 1320 12921 5096 CHAOS\001
+4 1 0 50 0 2 24 1.5708 4 255 1350 3570 5202 ORDRE\001
+4 1 0 50 0 0 14 0.5236 4 150 555 5737 1126 Chaos\001
+4 1 0 50 0 0 14 5.7596 4 150 510 10298 1036 Ordre\001
+4 1 0 50 0 0 14 2.6180 4 150 555 5873 9066 Chaos\001
+4 1 0 50 0 0 14 3.6652 4 150 510 10510 9126 Ordre\001
+-6
+6 4325 1874 11108 8317
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+4 1 0 50 0 2 18 4.7124 4 195 1035 12103 5111 Chim\350re\001
+4 1 0 50 0 2 18 4.7124 4 195 855 11473 5111 Libert\351\001
+4 1 0 50 0 2 18 4.7124 4 195 1275 10213 5111 Insouciant\001
+4 1 0 50 0 2 18 4.7124 4 255 690 10843 5111 \311ther\001
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+  <docinfo>
+    <title>Extrait de "Origine de l'Androgyne"</title>
+    <author>
+      <firstname>Fabien</firstname>
+      <surname>Niñoles</surname>
+      <email>fabien@tzone.org</email>
+    </author>
+    <copyright>
+      <year>1998</year>
+    </copyright>
+  </docinfo>
+
+  <title>Extrait de <emphasis>Origine de l'Androgyne</emphasis></title>
+  
+  <nda>
+    <para>Un des rares textes où l'auteur, un enfant d'Iol, semble
+      avoir eu connaissance de l'existence de plusieurs âges.  Les
+      références qui y sont faites se retrouvent dans des textes et
+      sur des oeuvres d'époques très éloignées.  Ce texte est une
+      excellente synthèse de l'évolution qu'a pu connaître la Genèse à
+      travers les éons.  Nous le reproduisons dans cet optique malgré
+      les accusations d'hystérie qui ont pesé sur l'auteur après sa
+      sortie.</para>
+  </nda>
+
+    <para>[...]</para>
+
+    <para>Au début, il y avait les Sept Dragons.  Ils étaient tous
+      frères et ne portaient pas de nom.  Mais leur Oeuvre et leur
+      Solidarité inspira les Hommes, et les plus sages et les plus
+      imaginatifs de ces derniers nommèrent les Sept Frères et
+      contèrent des histoires afin d'enseigner à leurs pairs.</para>
+
+    <para>Les Sept Dragons devinrent des Dieux.  Ils furent les
+      Premiers et les Créateurs de toute chose.  On les nomma Liberté,
+      Désir, Pouvoir, Volonté, Courage, Justice et Amour.  Mais les
+      Dragons étaient aussi puissants et redoutables.  On les nommait
+      alors Insouciance, Cécité, Oppression, Surdité, Témérité,
+      Tyrannie et Faiblesse.</para>
+
+    <para>Les Dragons n'étaient pas les seuls à impressionner les
+      Humains.  Plusieurs autres créatures captivèrent leur
+      imagination et de ces créatures, deux vinrent à être monter au
+      même niveau que les Dragons.</para>
+
+    <para>La première était la Licorne.  Déesse des Harmonies, la
+      Licorne représentait l'Éternelle Jeunesse, l'Âge d'Or, le
+      Bonheur parfait.  Elle offrait aux Hommes la vision d'un monde
+      magnifique mais qui était figé, sans imagination ni désir, sans
+      vie.</para>
+
+    <para>La seconde se faisait appeller la Chimère ou la Horde.  Elle
+      était Unique et Multiple, Destructrice et Créatrice, Rêve et
+      Cauchemar.  C'était une substance sans forme, le rêve et
+      l'horreur de toutes les possibilités, l'Infini et son
+      Néant.</para>
+
+    <para>Mais la langue des Hommes porte mal le souvenir et leur
+      mémoire oublie encore plus rapidement que leur courte vie.  Le
+      souvenir des Dragons se transforma.  Leur forme indéfinie fut
+      remplacée par de nouvelles ombres, de nouvelles couleurs, de
+      nouveaux éléments.  Comment la transition fut faites?  On ne
+      sait trop.  Elle prit simplement des milliers d'années.  Mais,
+      malgré les éons, certaines ombres, certaines couleurs et
+      certains éléments revenaient plus souvent que d'autres.  Comme
+      si la relation était inévitable.  Comme si ces éléments
+      contenaient la base de toute vérité.  Comme si l'Esprit des
+      Hommes arrivait à se souvenir de ce que l'Homme seul avait
+      oublié.</para>
+
+    <para>La Licorne reçut le nom de Justice. Elle resplendissait et
+      la lumière était son élément.  Elle conservait toujours sa
+      domination sur l'Ordre et apportait encore sous son sabot une
+      terrible Tyrannie.</para>
+
+    <para>Dans l'Air frivole et insaisissable, la Chimère s'opposait à
+      elle. Maîtresse du Chaos, du principe créateur, son vol grâcieux
+      et puissant symbolisait autant la Liberté que
+      l'Insouciance.</para>
+
+    <para>Auprès d'elle, deux acolytes se rassemblaient, proches et à
+      la fois loin par leurs éléments.  Le Phoenix, dont le Feu
+      embrasait tant le plumage que les coeurs, n'avait d'égal à son
+      Courage que sa Témérité.  Plus bas, cachant sa force formidable
+      sous un calme apparent, l'Hydre, tout comme l'Eau des mers et
+      des rivières, laissait croître son Désir dans un obscur
+      Aveuglement.</para>
+
+    <para>Face à ces monstres de passion, la Licorne s'enquérit de
+      deux alliés.  En effet, seule la solide Volonté Sourde d'un
+      Golem, tout de Métal luisant, pouvait s'opposait au Feu de
+      Rebellion du Phoenix.  Quant à la force tranquille et
+      dévastatrice de l'Hydre, seule une force comparable, l'Oppressif
+      Pouvoir de domination d'un Dragon, aux pattes et au ventre bien
+      ancrés dans la Terre, pouvait en venir à bout.</para>
+
+    <para>Le dernier Dragon semblait avoir disparu. Mais comme le
+      Phoenix qui renaît de ces cendres, comme la belle qui adoucit le
+      Dragon, sa Faiblesse n'est qu'apparence et temporaire. Redonnant
+      un coeur à la froide Volonté, ouvrant les yeux à Celui qui ne
+      voit plus, son armure n'est que la peau nue de la Chair. Donnant
+      un sens à la Justice, et la Force de se sacrifier pour autrui,
+      il fût appelé Amour avec un juste mérite. Et comme une cicatrice
+      qui ne veut pas se fermer, comme le souvenir de la Séparation
+      Première, l'Homme a choisit pour lui le corps de cette union
+      ancienne: celui de l'Androgyne.</para>
+    
+    <para>[...]</para>
+
+    <author>
+      <firstname>Caihui'n Taar</firstname>
+      <surname>e Parull</surname>
+      <title>Grand Prêtre de l'Église Androgyne</title>
+    </author>
+
+</story>
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+<story id="yeux" lang="fr">
+    <docinfo>
+    <title>Les yeux</title>
+    <author>
+      <firstname>Fabien</firstname>
+      <surname>Niñoles</surname>
+      <email>fabien@tzone.org</email>
+    </author>
+    <copyright>
+      <year>1994</year>
+    </copyright>
+  </docinfo>
+  <title>Les yeux</title>
+  <nda>
+    <para>Cette nouvelle est celle qui remporta la première place lors
+      du concours <emphasis>Écritures Ahuntsic</emphasis> édition
+      1993-1994. Je l'ai toutefois écrite en secondaire IV ou V, soit
+      trois ans plus tôt pour un travail de français.  Comme quoi les
+      travaux scolaires peuvent rapporter.</para>
+  </nda>
+  <section>
+    <poem>
+      <strophe>
+        <verse>Je t'ai vue un instant, et dans mes yeux, flottante,</verse>
+        <verse>l'image de tes yeux est demeurée,</verse>
+        <verse>comme une tâche sombre ourlée de feu</verse>
+        <verse>flotte et aveugle qui regarde le soleil.</verse>
+      </strophe>
+      <strophe>
+        <verse>Partout où mon regard se fixe</verse>
+        <verse>Je vois flamboyer leurs pupilles,</verse>
+        <verse>mais ne te trouve pas toi-même :</verse>
+        <verse>des yeux, les tiens, et plus rien d'autre.</verse>
+      </strophe>
+      <strophe>
+        <verse>Dans l'angle de ma chambre je les vois :</verse>
+        <verse>ils luisent seuls, fantastiques.</verse>
+        <verse>Je les sens qui planent dans mon sommeil,</verse>
+        <verse>Tout grand ouvert sur moi.</verse>
+      </strophe>
+      <strophe>
+        <verse>Je sais que dans la nuit des feux follets</verse>
+        <verse>conduisent à leur perte des voyageurs;</verse>
+        <verse>or je me sens par tes yeux entraîné</verse>
+        <verse>mais je ne sais où ils m'entraînent.</verse>
+      </strophe>
+      <author>
+        <firstname>Gustavo-Adolfo</firstname>
+        <surname>Becquer</surname>
+      </author>
+    </poem>
+  </section>
+  <section>
+    <citation>
+      <para>Des yeux, les tiens, et plus rien d'autre.</para>
+      <author>
+        <firstname>Gustavo-Adolfo</firstname>
+        <surname>Becquer</surname>
+      </author>
+    </citation>
+    <para>Ses talons marquaient le rythme de ses pas sur les dalles
+      mouillées du trottoir.  Une pluie légère, glacée par le vent
+      froid de décembre ruisselait sur son vieil imperméable alors que
+      ses cheveux sombres, un peu trop long au goût des "hommes de
+      société", défiaient le vent et s'amusaient avec lui.  Les
+      immeubles du quartier, inhabités, délabrés avec leur rénovations
+      inachevées, fixaient la rue de leurs grandes fenêtres
+      dépouillées.  Le regard lourd de tracas, Drouin se dirigeait
+      vers le café <emphasis>Shadow</emphasis> pour y prendre un verre
+      et y trouver peut-être l'inspiration manquante. "Demain, ce sera
+      ma dernière chance" rumina-t-il. Oui, c'était sa dernière chance
+      pour envoyer un texte chez son éditeur.  Si ce dernier
+      l'acceptait, il recevrait assez d'argent pour payer sa chambre
+      et se nourrir durant un autre mois, en attendant la réédition du
+      mensuel.  Mais seulement si ce dernier l'acceptait.  Cela
+      faisait trois mois qu'il n'avait pas réussi à créer quelque
+      chose de nouveau.  Ni poèmes, ni nouvelles, aussi petits
+      soient-ils.  Comme si en dix ans de métier, dix ans de dévotion
+      à une muse aussi capricieuse que le temps, il avait totalement
+      épuisé le sol de son imaginaire.</para>
+
+    <para>Un lampadaire clignotait sur les flaques d'eau devant le
+      café.  Dans l'une d'elles, colorée par l'huile d'une vieille
+      auto, on pouvait voir le reflet inversé du néon rose annonçant
+      le café <emphasis>Shadow</emphasis>.  C'était l'unique enseigne
+      du café et elle brillait au-dessus de la porte couverte de logos
+      de cartes de crédit.  Souvent, lorsque la nudité de son petit
+      appartement commençait à l'effrayer, Drouin aimait bien aller y
+      prendre un verre.  L'atmosphère chaude, alourdie par la fumée et
+      le manque d'aération de l'endroit, rappelait celle de ces vieux
+      films policiers que Drouin savourait comme un vieux cognac.  Le
+      café <emphasis>Shadow</emphasis> était un café pour amateurs.
+      Il était possible d'y réduire substantiellement le prix de ses
+      consommations en y présentant un bon numéro.  Parfois même, le
+      gérant offrait la tournée à l'artiste si le spectacle était
+      particulièrement réussi.  Cela lui était déjà arrivé quelques
+      fois auparavant.  Mais plus maintenant, plus depuis trois mois.
+      Ce soir, comme presque chaque soir depuis septembre, il irait
+      réciter un de ses vieux poèmes que tout le monde avait oublié,
+      excepté peut-être Tommy, le pianiste du café.</para>
+  </section>
+  <section>
+    <para>Drouin entra, faisant tinter les clochettes suspendues
+      derrière la porte.  Il écarta l'épais rideau pourpre qui
+      séparait la salle du vestibule et alla s'asseoir à une table
+      reculée.  Sur la scène, une jeune femme chantait une ballade aux
+      accents de <foreign lang="en">blues</foreign>, espérant
+      peut-être qu'un imprésario l'entende et décide de s'occuper de
+      sa carrière.  Sa voix résonnait encore de l'espoir d'un succès
+      facile et glorieux, rêverie des débutants.  Sa jeunesse la
+      supportait encore dans ce milieu dur et implacable.</para>
+
+    <para>La salle était plongée dans l'ombre, comme on pouvait s'y
+      attendre dans un tel endroit.  Parfois, une chandelle brûlait
+      sur une table, entre deux amoureux, ou devant le verre d'une
+      personne seule qui berçait sa nostalgie sur la voie de la
+      chanteuse.  À une autre table, deux hommes en habits sombres
+      discutaient avec une femme habillée tout aussi sévèrement,
+      désignant de temps en temps la scène de leurs regards.  La jeune
+      chanteuse termina sa ballade et, après un court silence, la
+      salle applaudit poliment.  Drouin se leva pour prendre son tour
+      et remarqua qu'un des hommes ainsi que la femme s'étaient levés.
+      Tandis que cette dernière se dirigeait vers le bar, l'homme s'en
+      alla chercher la chanteuse pour l'inviter à leur table.
+      Peut-être, après tout, aurait-elle sa chance comme lui-même
+      l'avait eue, dix ans plus tôt?</para> 
+
+    <para>Tommy était parti prendre un verre.  À son retour, Drouin
+      annonça qu'il voulait un accompagnement doux et tranquille pour
+      un poème en alexandrins.  Tommy comprit ce qu'il voulait et
+      reprit une gorgée de son verre.  Drouin s'avança sur la scène et
+      remarqua que la conversation entre la jeune femme et les deux
+      "hommes d'affaires" semblait s'animer.  Subitement, la chanteuse
+      se leva, renversa un verre de bière sur un de ses voisins de
+      table et partit précipitamment.  "Il y a des propositions qui
+      restent inacceptables, même pour débuter sa carrière" pensa
+      Drouin, amusé par l'embarras des deux comparses alors que
+      l'autre dame leur jetait un regard courroucé et tentait de
+      rejoindre la jeune femme.  Il s'installa devant le micro et
+      laissa sa vue s'habituer progressivement au projecteur braqué
+      sur lui.  Il fit alors signe à Tommy de commencer.</para>
+  </section>
+  <section>
+    <para>C'est à ce moment qu'il la remarqua.  Elle était assise
+      derrière les deux hommes.  Seule.  Discrète.  Belle...  Il n'y
+      avait que la faible lueur d'une chandelle voisine pour éclairer
+      son doux visage.  Sa blouse blanche reposait sur de fines
+      épaules et son col se détachait sur un cou gracieux entouré de
+      longs cheveux sombres.  Sa peau était claire, d'une blancheur
+      d'albâtre, et la bouche aussi fine que le nez.  Mais ce qui
+      l'impressionna le plus, c'était ses yeux.  De grands yeux
+      clairs, flamboyants.  Drouin sentit monter en lui l'envie de
+      plonger dans l'enfer de ces yeux qui le fixaient, de se perdre
+      dans le puits noir des pupilles qui reflétaient son propre
+      regard.  Et il s'y perdit effectivement.  Le piano fit sonner
+      ses premiers accords mais pour Drouin, il n'y avait que ces yeux
+      remplis de toutes les étoiles du firmament.  Et la musique en
+      faisait partie, comme une servante dévouée à l'intensité de ce
+      regard.  Elle venait d'un grand vaisseau voguant sur la crête de
+      la Voie Lacté, entre deux Univers.</para>
+
+    <para>Discrètement, sa muse lui était revenue.  Il s'était mis à
+      réciter des vers nouveaux, des vers tels qu'il n'en avait jamais
+      écrits ni lus.  Mais Drouin n'était plus sur la scène.  Il était
+      quelque part entre le gouffre qui mène au Paradis et le trou
+      noir qui mènent là où naissent les étoiles, toujours dans les
+      yeux de la dame. Les vers se succédèrent, tous magnifiques,
+      versant leurs images, leurs symboles, montant dans un grand
+      crescendo, pour enfin finir tout doucement comme le souffle
+      d'une brise.  Il y eut un bref silence.  Puis quelqu'un se leva
+      et applaudit.  Et la salle lui fit une ovation.  Un homme
+      accosta la dame et l'emmena vers la sortie.  Drouin revint
+      brusquement à la réalité.  Michel, le gérant de l'établissement,
+      venait d'offrir une tournée générale à toute la salle!  Mais
+      Drouin ne s'en occupa point et se précipita vers la porte pour
+      suivre la dame aux yeux si beaux.</para>
+
+    <para>Dehors, la bruine s'était arrêtée. Une voiture grise passa
+      devant le café et tourna au coin de la rue.  Peut-être était-ce
+      celle de la dame?  Il n'en savait rien et décida de rentrer chez
+      lui sans détour.  Rendu à sa chambre, il s'installa à son
+      pupitre, face à la fenêtre qui s'ouvrait sur la nuit lumineuse
+      des villes, prit la plume qui l'avait si longtemps accompagné,
+      et écrivit les vers qui allaient le rendre célèbre.</para>
+  </section>
+  <section>
+    <para>Quelques jours plus tard, Paul Drouin avait enfin un nom, un
+      vrai.  Les critiques parlaient de lui comme d'un génie de l'art
+      littéraire, un maître de l'art poétique.  On allait rééditer
+      cinq mille exemplaires de son dernier recueil.  Il avait aussi
+      reçu une fort jolie somme en avance grâce à laquelle il avait pu
+      payer sa chambre pour les trois prochains mois et rembourser ses
+      quelques dettes.  Mais la célébrité n'intéressait plus vraiment
+      Drouin.  À son retour de la maison d'édition, la veille, il
+      était passé à nouveau par le café <emphasis>Shadow</emphasis>,
+      souhaitant y reconnaître la dame et ses yeux si tendres.  À un
+      certain moment, il avait bien cru entrevoir son regard dans un
+      recoin.  Mais lorsqu'il s'y était rendu, il n'y avait trouvé
+      personne.  Il était alors rentré chez lui et avait écrit une
+      dizaine de nouveaux poèmes, de nouvelles strophes qui aideraient
+      à remplir d'adjectifs pompeux et empesés les pages des
+      critiques.  Mais tout ceci ne préoccupait plus Drouin.</para>
+
+    <para>Ces dernières nuits n'avaient pas été reposantes.  Les yeux
+      le hantaient de plus en plus, dérangeant son sommeil, ses rêves.
+      Il était sûr de n'avoir pas dormi du tout la nuit précédente.
+      Les yeux étaient là, flottant au-dessus de lui, braises ardentes
+      le fixant, le charmant de l'idée obsédante d'un long voyage.
+      Ils étaient partout, intarissables messagers venus d'ailleurs,
+      lui demandant de les rejoindre, de les suivre pour de bon vers
+      un marécage céleste, quelque part près des étoiles.  Cela le
+      troublait, le laissait aussi impuissant qu'un voyageur perdu
+      face aux feux follets.</para>
+  </section>
+  <section>
+    <para>Les yeux l'avaient suivi toute la journée.  Il les voyait
+      partout, dans les miroirs et les vitrines, dans chaque recoin et
+      à chaque détour.  Il les voyait partout, et toujours ils lui
+      disaient la même chose, toujours ils l'invitaient à les
+      suivre.</para>
+
+    <para>Drouin se rendit au petit café.  Il s'assit et commanda.
+      "Du fort s'il te plaît, n'importe quoi mais du très fort"
+      demanda-t-il, appuyant sur les derniers mots.  Déjà, les yeux
+      l'assaillaient de toutes part.  Il but d'un trait le verre qu'on
+      lui servit et la boisson lui brûla la gorge.  "La bouteille!"
+      cria-t-il, déjà légèrement grisé par la fatigue et l'alcool,
+      auquel il n'était pas habitué.  Les yeux continuaient de le
+      fixer, curieux de ses manières, invitant dans les leurs.  La
+      liqueur arriva et il cala un deuxième verre.  Les yeux le
+      regardaient d'un coin de la salle, tranquille dans leur rigidité
+      hypnotique.  Un autre verre jeté au fond du gosier et les yeux
+      le fixaient au travers d'une fenêtre.  Hop! et hop! deux autres
+      verres.  Les yeux l'invitaient de derrière un rideau, dissimulés
+      mais toujours aussi intances.  Encore un verre et une longue
+      rasade.  Les yeux le séduisaient par delà un miroir.  Il fit cul
+      sec et vida sa bouteille.  Les yeux l'avaient pris totalement à
+      travers le fond cristallin de son verre.</para>
+
+    <para>Sa volonté, affaiblie par l'alcool, se laissa porter par les
+      courants de l'espace nu qui étaient au fond des yeux.  Il
+      traversa le feu phosphorescent de l'iris, frontière du trou noir
+      où il se rendait, là où naissent les étoiles.  Des myriades
+      d'étoiles, autant de petites lumières pâles, clignotantes,
+      devenant de par leur nombre une seule et grande lumière, si
+      blanche et si brillante qu'elle éclairait à elle seule toutes
+      les ténèbres, toutes les noirceurs, tous les mensonges.  Une
+      lumière si pure qu'elle effaçait toutes les ombres pour ne
+      laisser voir que...  la vérité.</para>
+  </section>
+  <section>
+    <para>Drouin reprit ses esprits, soudainement dégrisé par ce qu'il
+      venait de voir.  Il se leva d'un bond et partit d'un pas rapide.
+      Ce long voyage n'avait duré qu'un temps mais il n'en avait plus
+      à perdre.  Dans la rue, il ne put s'empêcher de courir comme un
+      fou qui croit que la mort est sur ses talons.  Il savait qu'il
+      n'en avait pas pour longtemps, que les yeux reviendraient le
+      chercher une ultime fois, sans retour.  Il espérait ce moment
+      presqu'autant qu'il le craignait.  Mais l'écriture avait été
+      toute sa vie et il devait écrire, ne serait-ce qu'une dernière
+      fois, avant d'aller se reposer à jamais.  Drouin savait quoi
+      écrire.  Il connaissait ce marécage céleste, il savait ce
+      qu'étaient ses yeux de feux, ce feu, et surtout il savait qu'il
+      ne pourrait pas s'en sortir.</para>
+
+    <para>Rendu à son pupitre, Drouin prit sa plume et se mit à écrire
+      ardemment.  Il ne se risqua pas à regarder les étoiles, il
+      savait qu'ils prenaient possession de son firmament, de sa
+      ville, de ses murs, de sa chambre.  Il ne restait que lui, son
+      pupitre, sa plume et son écriture.  Alors lentement,
+      irrémédiablement, les yeux prirent son pupitre; mais les
+      feuilles continuaient d'être soutenues et Drouin écrivait
+      toujours.  Ils prirent sa plume; mais même sans elle, Drouin
+      continuait d'écrire.  Ils prirent sa feuille et son écriture
+      mais Drouin continuait d'écrire sans voir ce qu'il écrivait.
+      Ils voulurent alors prendre son esprit.  Drouin lutta, il
+      voulait, il désirait à tout prix terminer son poème.  Les yeux
+      prirent son passé, ses souvenirs et Drouin écrivait.  Ils lui
+      prirent ce qu'il savait, ce qu'il aimait et Drouin écrivait.
+      Puis ils prirent son nom et ce qu'il était.  Il ne lui restait
+      plus que son dernier poème et déjà les premiers vers
+      disparaissaient.  Il devait finir ce poème mais les mots
+      s'envolaient un à un face à la disparition de sa volonté.  Il
+      devait le finir, il devait, il...</para>
+  </section>
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