Jugement

Ricochets du galet se perdant dans la mer
Attirent son regard vers le vieil horizon.
Comme vagues mourant sur les pieds du garçon,
Sont ses souvenirs, à son cœur, sous le ciel couvert,
Ne laissant la trace que des plus blancs moutons.

Sous ses pas, le sable l'entraîne et vers la terre
- Terre sans visage où il a bâti maison,
Qui l'a adopté sans lui demander raison -
Ayant brûlé ses pieds, la chaleur qui se terre
Devenue depuis si agréable abandon


Il rêva un jour de parcourir les Sept Mers
Il partit la nuit dans le froid de la saison
Son corps maigre vêtu de laine et de haillons
Il quitta le port sur son vaisseau solitaire
Capitaine de son sort, de ses décisions

Il subit tout à la fois la foudre et l'éclair
Les tempêtes d'ouragan, les mers de typhon
Et la morsure des récifs de trahison,
Tel un pirate abordant l'épée au clair,
Brisa sa coque sans l'emmener au fond

Échoué sur la berge et rongé par ses vers
Son vaisseau pourrissait de la cale au pont
Tomber sur la plage, sur le sable blond
Son cœur qui lui laisse, du sang, un goût amer
Et de sa Dame, une prudence de poltron.


Remis à ce jour de ses plaies, de ses revers
Est le marin qui, seul, tirant de ses leçons,
De son sort, du destin, cette triste instruction :
Quand un jour, de nuit, elles te prennent de travers
Elles te font chavirer, ces brises de passions

27 septembre 1993

© Fabien Niñoles 1993
Notes de l'auteur.